24 et 25 avril 1967
Récupération de 20 Wagonnets au Latiremont


1987

Après le transfert des deux locotracteurs du Bréhain, il n'était pas incongru de penser qu'un jour, un train circulerait à nouveau dans les galeries du Schoenenbourg. Mais qui dit "train" dit aussi "wagons".

Les wagons étaient à cette époque (comme encore de nos jours) une chose dont on ne pouvait se passer dans un gros ouvrage. Au Schoenenbourg, ils servaient à transporter les tonnes de matériels que nous venions de récupérer ou allions encore récupérer. Comme notre ouvrage ne possédait pas de magasin M1, il fallait également stocker ces matériels sur les wagons, que l'on remisait dans des galeries non ouvertes au public. Et puis, les wagons étaient les matériels les plus adaptés pour meubler ces grandes gares et ces galeries sans fin.

DES WAGONS VOYAGEURS

Nous étions au courant qu'une vingtaine de wagonnets étaient entreposés dans l'entrée des munitions de l'ouvrage de Latiremont. Ce serait une opération facile. La demande de transfert obtint l'agrément de l'Etat-major de Metz et c'est à nouveau l'adjudant-chef Chrétien qui, le 14 avril 1987, nous ouvrit les grilles de cet ouvrage que peu d'entre-nous avaient eu l'occasion de visiter, car le Latiremont était bien surveillé et aucun clandestin n'avait réussi à s'y introduire jusque-là.

En peu de temps, 23 wagonnets dont seulement deux de type Sud-Est et une citerne se retrouvèrent alignés sur le terre-plein de l'entrée. Selon l'adjudant-chef, la plupart d'entre-eux n'étaient pas originaires de l'ouvrage, mais provenaient de l'ouvrage voisin de Fermont . L'association qui s'occupait du Fermont avait obtenu l'autorisation d'échanger ses wagons "fatigués" par des années de convoyage de touristes, par des wagons de Latiremont . Plusieurs wagons étaient vrillés et roulaient "en crabe", car victimes d'une erreur d'aiguillage qui envoya la rame dans un mur de la galerie principale de Fermont.

L'ETONNEMENT DES TECHNICIENS DE FERMONT

Justement, alors que nous étions en train de préparer le chargement, arrivèrent trois techniciens de Fermont venus récupérer des éléments électromécaniques des monte-charges de l'entrée des munitions, qui de toute façon n'étaient plus en état de fonctionner. Ces anciens techniciens de mines de fer allaient réussir, quelques mois plus tard, la plus grande récupération des toutes celles entreprises sur la ligne Maginot, c'est-à-dire de déménager l'étage supérieur de trois des cinq tourelles de l'ouvrage du Bréhain, pour les mettre en exposition dans un hall à l'entrée de l'ouvrage de Fermont.

Je me souviens parfaitement de la mine ébahie des trois bénévoles, quand ils apprirent de la bouche de l'adjudant-chef que nous étions venus du fin fond de l'Alsace pour chercher les wagonnets de leur voisin Latiremont, eux qui pensaient avoir le monopole de fait sur ce secteur. Il n'y avait pas de monopole. C'était "à premier arrivé, premier servi". Ils se sont fait une raison, d'autant plus que nous cherchions des wagonnets dont ils s'étaient débarrassés. .

Au moment du départ, pas de pincement au coeur ; il était évident que le Latiremont était condamné. Il sera lui aussi largement ouvert à tous vents et pillé à la fin des années 1990.

Ainsi, les wagons du Schoenenbourg ont beaucoup voyagé. Il proviennent des ouvrages de Métrich, de Bréhain, du Mont des Welches, du Latiremont, du Hochwald. Toute une histoire.

Jean-Louis Burtscher, décembre 2000.

VENDREDI 24 AVRIL, 9h00

14 de nos membres endossent leur tenue de travail devant l'entrée des munitions de l'ouvrage de Latiremont. L'épaisse dalle de béton (3,50 m alors qu'il n'y a que 2,50 m au Schoenenbourg) contraste joliment avec les verts pâturages qui cernent les deux entrées. Au loin, le casernement de Doncourt semble posé comme un jeu de construction dans le paysage campagnard.

L'adjudant-chef Chrétien, responsable du Génie local a déjà ouvert la grille d'entrée et les premiers arrivants s'évertuent à débloquer la grosse porte blindée qui n'avait plus coulissé depuis 1986. Ce sera le seul obstacle qui risquait de créer la surprise, car nous savons que les monte-charges ne peuvent fonctionner.

Qu'importe, la vingtaine de wagonnets et le support de jumelage qui ont fait l'objet de notre demande sont à prendre dans l'entrée. A défaut d'ascenseur, le petit matériel récupéré dans les dessous sera porté à bout de bras.

Cette opération a un but précis: recompléter notre dotation ferroviaire ainsi que certaines pièces manquantes essentielles à la remise en état de notre atelier d'usine.

Les wagonnets ne sont plus dans le meilleur état, car victimes des fréquentes variations climatiques propres à toutes les entrées d'ouvrage. Qu'importe, Ils feront largement l'affaire. Le gros de l'équipe les préparera au chargement en les poussant hors du bloc.

Pendant ce temps, une deuxième section se rendit dans les dessous pour y démonter le petit matériel soigneusement répertorié. Les wagonnets (en fort bon état) qui subsistaient dans le M1 servirent pour transporter ces pièces jusqu'au pied de l'escalier, à 25 m sous terre.

La pause de midi coïncida avec la fin des travaux préparatoires et l'ensemble des participants déjeuna sous un ciel radieux et une température des plus agréables ; la chance était avec nous. A partir de 13h, tout le monde prit le chemin des profondeurs car il fallait remonter le matériel démonté précédemment. Les 120 marches furent gravies 5 à 7 fois de suite. Ce ne fut pas une mince affaire, car nombre de pièces étaient pesantes.

Entre-temps, le transporteur que nous avions commandé était arrivé et empilait rapidement les wagonnets sur son camion. Le fait d'avoir une grue intégrée au plateau facilitait bougrement la chose.

A 15h, tout était chargé, il y en avait pour une quinzaine de tonnes. Quand le camion prit le chemin du retour, tous les participants redescendirent sous terre pour découvrir l'étendue de cet ouvrage que peu d'entre-eux connaissaient.

Latiremont est superbe par endroits, très dégradé en d'autres. Les entrées d'eau, de boue et surtout de calcaire en ont fait un ouvrage que bien peu d'associations se risqueraient à restaurer. Malgré tout, les tourelles, l'usine, le MI, certains tronçons de galeries sont dignes d'intérêt.

Les blocs d'artillerie sont vides de tout équipement et sont, par ailleurs, accessibles par un escalier d'une hauteur considérable. A l'issue de la visite, certains d'entre-nous avaient parcouru 3000 marches, de quoi fatiguer les plus costauds.

Oui, ce fut une journée réussie. On avait joint l'utile à l'agréable, l'organisation était irréprochable, les objectifs atteints. Il est vrai que nous n'en étions pas à la première récupération et que nos gars ont toujours de l'intérêt pour les nouveautés.

Mais ce n'était pas fini, car le lendemain il fallut décharger au Schoenenbourg tout ce qu'on avait amassé la veille. Les wagonnets subirent un nettoyage sommaire et furent convoyés un à un dans les dessous de notre ouvrage. Ce travail achevé, la petite équipe qui avait rejoint le Schoen ne resta pas inactive puisqu'elle déboucha pour la Xème fois les satanés égouts de l'infirmerie.

Merci à eux, merci à tous ceux qui ont participé à la "récup" de Latiremont. Vous avez démontré une fois de plus que L'AALMA n'était pas prête à s'endormir sur ses lauriers. Merci ... et à la prochaine.


- Suite