Ultime et grosse opération de démontage à Bitche
Consciente de la difficulté
que subissent les associations pour assumer de lourdes opérations de transfert
de matériels d’origine – prise de congé pour les participants, nécessité
de disposer de nombreux bras, hébergement, organisation des transports, etc, -
l’armée a autorisé un troisième et dernier prélèvement à partir des
ouvrages entourant Bitche, soit à partir du Schiesseck, de l’Otterbiel, du
Grand Hohekirkel. C’est donc du 7 au 10 novembre inclus qu’un assez grand
nombre de bénévoles de l’AALMA s’est
à nouveau engagé pour passer jusqu’à quatre jours consécutifs dans la
fortif du pays de Bitche.
Lundi
7 novembre, 11 h.
Toute l’équipe se
retrouve à l’ouvrage du Schiesseck. De là, les militaires accompagnent nos
membres vers l’ouvrage d’Otterbiel qui n’est plus accessible, en voiture,
qu’en empruntant les routes militaires du Camp de Bitche. Aussitôt, les
participants pénètrent dans l’ouvrage pour repérer le matériel qu’il
sera intéressant d’emporter, mais aussi, pour la plupart, pour découvrir cet
ouvrage qui n’avait, pour ainsi dire, jamais été accessible aux civils.
Là, une petite déception,
l’Otterbiel ne recèle plus guère d’éléments intéressants, ceci, pour
plusieurs raisons. D’une part, les musées militaires ont déjà emporté
nombre de matériels, dont l’intégralité de la cuisine, un groupe électrogène,
les machines de l’atelier, etc. Par ailleurs, la caserne était vide et les
blocs de combat ne recelaient pas grand-chose. D’autre part, il faut savoir
que l’Otterbiel est véritablement un ouvrage atypique : son gros œuvre
a les dimensions d’un gros ouvrage, mais ses équipements correspondent en
grande partie à ceux d’un petit ouvrage. Autrement dit, c’est un ouvrage
d’artillerie sans artillerie, équipé comme un ouvrage d’infanterie.
Il lui reste sa merveilleuse
salle des filtres et ses arrières exempts de toute humidité et repeints à de
multiples reprises. Par contre, ses blocs sont dans un état beaucoup moins
reluisant. Ajoutez à cela qu’il
n’est représentatif ni d’un grand ni d’un petit ouvrage, on comprend donc
mal toute l’agitation qui eut lieu il y a quelques années sur la préservation
de cet ouvrage.
C’est donc au PC et à
l’observatoire, haut de 365 marches, que purent être dénichés et rapportés,
au courant de l’après-midi, quelques matériels intéressants. Pendant ce
temps, d’autres bénévoles s’attelèrent au démontage d’un lot de
filtres à air qui avait été remisé dans une galerie en cul de sac. Ces
filtres étaient dans un état de conservation remarquable, et chose absolument
rare, dans leur emballage de transport. Ils seront parfaits pour remplacer les
filtres de réserve du Schoenenbourg non livrés ou que nous avions dû éliminer,
car trop corrodés.
Pendant ce temps, au
Schiesseck, nos mécaniciens commençaient à dépouiller la chambre de tir de
la tourelle de 75/32 où les canons et leur affût avaient été enlevés lors
des deux précédentes opérations) de tous les équipements annexes, de manière
à pouvoir bientôt présenter aux visiteurs, au Schoenenbourg, une chambre de
tir complète.
Mardi
8 novembre
L’équipe de démontage de
l’Otterbiel poursuit son œuvre par le démontage et le transport vers
l’entrée des premiers filtres démontés, d’armoires métalliques, d’un
établi d’atelier, de rhéostats et de lampes de cloche, etc.
A midi (comme tous les
midis), nos bénévoles se retrouvent à l’entrée du Schiesseck où arrivent
les plats chauds commandés chez le boucher de Bitche. Une méthode qui a fait
ses preuves, en débarrassant nos membres du souci d’organiser leur propre
intendance pendant plusieurs jours. Comme il fait beau et que le froid n’a pas
encore fait de véritable apparition, c’est une bienheureuse détente, on se
croirait presque au Club med.
Après le repas, toute l’équipe
se dirigea vers le grand Hohekirkel, pour voir quels matériels pourraient
encore faire l’affaire. Grosse déception : très peu d’équipements au
grand Hohé, beaucoup ayant disparu, emportés par les associations qui avaient
oeuvré là lors de la première et de la seconde récupération. Ce fut une
occasion de faire …du tourisme, cet ouvrage n’ayant guère été visité par
des civils car implanté sur le champ de tir du camp de Bitche. Pas inintéressante,
la balade souterraine, le Grand Hohé recelant plusieurs particularités dont
son bloc observatoire, son usine en coin et ses galeries sans une trace
d’humidité, conçues presque à la manière des ouvrages des nouveaux fronts.
Mercredi
9 novembre
L’équipe de l’Otterbiel
se remet à l’œuvre, il faut sortir de l’ouvrage tout ce qui va être
emporté le lendemain. Doivent alors passer le portillon de la grosse porte
blindée, les lourdes armoires métalliques, les derniers filtres, la coiffe et
le moteur du puits d’eau potable, l’établi. Grâce au chariot à quatre
roues fabriqué par nos techniciens en 1982 pour les premières récupérations
à l’ouvrage de Métrich, ces gros matériels purent être transportés sans
difficultés depuis les endroits les plus reculés de l’ouvrage.
Au Schiesseck, même scénario :
les deux évacuations de douilles de la tourelle de 75, les deux norias hautes,
une noria basse, un moteur de tourelle, un grille d’usine, un élément de
plancher de cloche d’arme mixte, un coffret téléphone et les dernières
lampes suspendues de cet ouvrage sont transportés à l’entrée, jusqu’au
soir.
Jeudi
10 novembre
L’ensemble du matériel
extrait de l’Otterbiel doit encore être transporté dans un pré, à 800 mètres
de l’entrée, le chemin menant à l’ouvrage ne permettant pas l’accès par
un camion. L’après-midi, le poids lourd et sa remorque sont chargés à
l’aide de la grue auxiliaire du camion. Puis c’est le retour vers
l’Alsace.
Le soir, tout le monde a
retrouvé ses pénates et ses habitudes, avec une pensée pour ces ouvrages de
Bitche, quasiment intacts il y vingt ans, dépouillés aujourd’hui pour le
plus grand bonheur des associations qui ont soustrait ces matériels normalement
condamnés à l’inexorable dégradation de la rouille et de l’abandon.
Samedi
12 novembre
Le 11 étant la dernière
journée d’ouverture publique au Schoenenbourg, il était impensable de décharger
le matériel qui était resté en attente sur le camion. C’est donc le 12
qu’on procéda au déchargement du poids lourd et de sa remorque, suivi du
rangement immédiat des divers éléments qui remplirent au total une dizaine de
wagons.
Pour conclure, ce fut une
belle opération, où les bénévoles se donnèrent une fois de plus à fond.
Ils méritent tous nos remerciements. Méritent également nos remerciements les
plus sincères l’administration du Ministère de la défense (les
autorisations sont données par la ministre de la Défense en personne), l’Etat-major
de la région Nord-Est, la commission Défense-Associations qui a fait avancer
les choses à une vitesse peu courante dans l’administration militaire, vu la
complexité du dossier ; le secrétaire général de la Fédération des
Associations de Sauvegarde de la Fortification, qui a été le patient
initiateur de ce qui paraissait encore impensable il y a quelques années. Merci
à tous.
Texte documenté d’après
le journal de bord de notre administrateur Claude Burcker.