Bulletin 1 de 2007


Editorial

PAS QUE DES CERTITUDES

La recherche des éléments de notre passé est une chose passionnante. Alors que l'on croyait tout savoir, apparaissent quelquefois des faits qui vous surprennent et qui vous ébranlent dans vos certitudes. Dans ce domaine, la ligne Maginot, elle aussi, peut encore réserver quelques surprises.

Concernant notre fort de Schoenenbourg, un événement absolument inattendu allait combler, en ce printemps 2006, une de nos plus importantes lacunes dans la connaissance de notre ouvrage : la vraisemblable certitude de la découverte de l'auteur des peintures murales du bloc 5.

Le tout a commencé sur Internet ou une dame, qui en consultant notre site et notamment la partie consacrée aux peintures murales du fort, fit un rapprochement avec la passion de son grand-père pour les dessins de Mickey, cette souris caricaturée conçue par l'inventeur des dessins animés Walt Disney. La dame et sa famille se déplacèrent même au Schoenenbourg pour examiner les peintures et ensuite entreprendre des recherches sur les activités de son aïeul.

Petit à petit, les choses devinrent plus nettes et les certitudes plus évidentes. Il semblerait bien que l'auteur des dessins de Mickey du bloc 5 soit Jean Roland Matt, artisan peintre en bâtiment, originaire de Nancy, ayant vécu à Domartemont (Meurthe-et-Moselle) et décédé à Essey-les-Nancy en 1986.

Jean Matt était un véritable fanatique des personnages de Walt Disney. Au domicile familial, il avait peint de nombreuses frises consacrées à Mickey. En 1939, il était artilleur, en poste au bloc 5 de notre ouvrage où il avait même été sérieusement blessé en juin 1940 par l'explosion d'un des deux canons de 120 de Bange en position à l'extérieur de ce bloc. Les longs mois de la "drôle de guerre" lui ont sans doute laissé le loisir de peindre plusieurs oeuvres encore visibles de nos jours.

Mais une autre certitude historique relative au Schoenenbourg a, quant à elle, pris du plomb dans l'aile. Ainsi Roger Bruge, journaliste et historien qui publia à la fin des années 1970 une monumentale œuvre sur les combats de la Ligne Maginot, cita en parlant de l'artillerie lourde qui bombarda le Schoenenbourg, l'emploi par les Allemands d'une batterie de 420mm et d'une autre de 355mm. Il serait inconvenant de douter du sérieux de Roger Bruge et de la qualité de ses recherches ou de la véracité de ses sources, mais…

Mais au vu des connaissances actuelles, nous pouvons douter fortement de l'emploi de la pièce de 355 mm contre le Schoenenbourg. De nombreux arguments vont d'ailleurs dans ce sens. Pour commencer, il n'existe aucune photo montrant cette pièce pointée sur le fort, alors que le 420 a été photographié à de nombreuses reprises, par différents témoins. Ensuite, on n'a retrouvé aucune trace de débris de ce calibre sur les dessus de notre ouvrage. Le capitaine Stroh a bien reconstitué, d'après les éclats, des projectiles de 420mm, pas de 355.

Pourtant, les Allemands, malgré la destruction de l'intégralité de leur artillerie lourde après 1918, possédaient bien une pièce de 355 M1 qui venait justement d'être mise en service en 1939. Cet impressionnant obusier, de conception récente, était le premier de ce calibre à être fabriqué par la métallurgie allemande (Rheinmetall), alors que le 420 était tout bonnement de la récupération tchécoslovaque (véritable appellation : mortier austro-hongrois M16, fabriqué par Skoda). On peut penser que si les deux pièces avaient tiré sur le Schoenenbourg, la propagande allemande, qui savait si bien utiliser ce genre d'événement, aurait sans doute magnifié le fleuron de la production nationale en mettant en avant le 355 plutôt que le vieux 420 prélevé chez les Tchèques.

Or, rien de tout cela, pas une photo, pas une ligne, comme si cette pièce que cite Roger Bruge, mais aussi les archives allemandes, n'avait jamais existé. Peut être bien qu'elle a existé, mais on peut imaginer que des difficultés techniques dues à sa nouveauté en ont entravé la mise en action, et qu'on a tout bonnement préféré ne pas en parler.

Comme quoi notre histoire s'écrit à coup de certitudes, de presque certitudes, mais aussi d'incertitudes.

Jean-Louis Burtscher

 

LA VIE DE L’ASSOCIATION

8 juillet 2006 : les anciens combattants du secteur fortifié de Haguenau déposent une gerbe au pied du monument commémoratif national érigé à l’entrée du fort de Schoenenbourg. Participent à cette digne cérémonie le député Frédéric Reiss, des représentants de la base aérienne 901, Michel Mansuy, secrétaire général de la Fédération des associations de sauvegarde de la fortification, et bien entendu, notre président Marc Halter.

Juillet : les services de l’Equipement installent le long de l’autoroute A 35 (Lauterbourg-Strasbourg) plusieurs panneaux indiquant, par des graphismes simples, les curiosités touristiques existant dans les zones traversées par l’autoroute. De part et d’autre de l’échangeur de Seltz, deux grands panneaux portant la mention « Ligne Maginot » surmontée d’un dessin de l’entrée des munitions de notre ouvrage invitent les automobilistes à la découverte de ces fortifications.

22 juillet : Les membres habituellement actifs au Schoenenbourg le samedi s’accordent un moment de détente par la visite des abris de la Walkmuhl et de Birlenbach, suivie par celle du réduit du Hochwald. Un déplacement plein d’enseignements, surtout au réduit où l’on peut apprécier tous les stades de la construction d’un ouvrage. Pour information, ces trois sites sont clos et ne sont visitables qu’avec l’autorisation du commandement de la BA 901.

Juillet : Il fait chaud et on est à la limite de la canicule. Notre président a une intuition, il informe la télé régionale que les souterrains de la ligne Maginot sont idéaux pour se mettre au frais. Une équipe de télévision de FR 3 Alsace vint alors effectuer un reportage qui sera diffusé le 26 en région et le 27 sur toute la France.

27 juillet : Une fois de plus, le Schoenenbourg reçoit des hôtes de marque en la personne de M. Ettmayer, ambassadeur et représentant permanent de l’Autriche auprès du Conseil de l’Europe, ainsi que de Mme Ellison-Kramer, consul général de la république d’Autriche, représentante permanente adjointe auprès du Conseil de l’Europe.

6 et 9 août : Toujours sur le thème de la recherche de la fraîcheur, la chaîne nationale Antenne 2, à son tour, filmera au Schoenenbourg et diffusera un reportage le 9. On ne pouvait rêver de meilleure promo.

24 septembre : Prise en charge d'un chercheur américain (Chad Randl) de

l'université de Princeton, pour une étude sur notre tourelle et pour écrire un livre.

Octobre : Des visiteurs mal intentionnés commettent un vol, vraisemblablement durant une visite guidée. Disparaissent ainsi de l’entrée des munitions du Schoenenbourg, une lampe de secours triangulaire (pourtant abritée derrière un panneau en plexiglas) et un manomètre de surpression, à l’entrée de la chambre de tir.

Samedi 28 octobre : le Schoenenbourg reçoit la visite des membres actifs de l’association qui a restauré et pris en charge la casemate de l’Aschenbach, à Uffheim. Sous la présidence de Bertrand Pfaff, cette équipe a fait un travail remarquable sur le seul site de la ligne Maginot ouvert au public dans le département du Haut-Rhin.

31 octobre : notre président a guidé une journaliste allemande (Gisela Jansen) pour un reportage dans le journal Badische Neueste Nachrichten.

11 novembre : prise en charge de M Guererrio, élève architecte à Paris,

qui est en train de travailler sur un projet de transformation (théorique pour son diplôme) et de réaffectation du Schoenenbourg, pour en faire un village souterrain de 700 âmes.

Dimanche 12 novembre : notre président accueille et guide à travers notre ouvrage le président Patrick Visini et les membres actifs de l’ARFUPE, une équipe de bénévoles qui a pris en charge et qui a réalisé un magnifique travail de restauration sur le fort d’Uxegney, près d’Epinal.

14 novembre, prise en charge d'une journaliste polonaise, Mme Dagmara.

18 novembre : nos représentants se déplacent à Marckolsheim pour assister à l’assemblée générale de la Fédération des associations de la ligne Maginot d’Alsace.

Jeudi 30 novembre : la casemate Esch et le fort de Schoenenbourg reçoivent la visite du général de corps d’armée Jean-Marie Faugère.

Samedi 2 décembre : l’équipe de travail du Schoenenbourg se déplace en Moselle à l’invitation de l’association qui restaure la casemate de Wittring. Cette casemate simple (à une chambre de tir) de type « nouveau front » est le dernier ouvrage CORF avant la zone inondable de la Sarre. De sa dalle émergent quatre imposantes cloches dont deux GFM type B et deux pour armes mixtes, dont chose exceptionnelle, une cloche comportant une seule embrasure de tir (les cloches pour arme mixte comportent généralement deux embrasures), cette dernière couvrant, en 1940, le barrage de Wittring.

Samedi 16 décembre : repas de fin d’année, au restaurant Buereeck, à Schoenenbourg, où sont alors réunis autour d’une paella, les bénévoles régulièrement actifs et les salariés de l’association.

 

UN GENERAL AU SCHOENENBOURG

Plusieurs hauts personnages militaires avaient déjà visité le fort de Schoenenbourg, dont le ministre de la défense de la République populaire de Chine et le chef d’Etat-major de l’armée thaïlandaise, mais aucun personnage équivalent du côté français n’avait daigné mettre les pieds dans notre patrimoine on ne peut plus national, aujourd’hui mondialement connu. Eh bien, c’est chose faite.

En septembre, l’aide de camp du général de corps d’armée Jean-Marie Faugère prit contact avec notre président pour préparer la visite de son patron. Nous avions déjà accueilli les généraux de brigade Cousine et Masson, alors responsables du patrimoine de l’armée de terre, tout comme le général Boisredon, alors gouverneur militaire de Strasbourg. Mais cette fois-ci il s’agissait du commandant des forces terrestres de l’ensemble du Nord-Est de la France ainsi que des personnels encore en garnison en Allemagne, avec, en outre, la fonction de Gouverneur militaire de Metz.

C’est le jeudi 30 novembre, à 11 h, que s’immobilisèrent sur le parking de la casemate Esch, à Hatten, plusieurs voitures, dont celle du général et de son aide de camp, celle de Michel Mansuy, le secrétaire général de la Fédération des associations de sauvegarde de la fortification accompagné de Francis Novelli, son adjoint, ainsi que celle d’une délégation de la base aérienne 901, car le général avait fait un crochet par Drachenbronn.

N’ayant pu se libérer de son travail d’enseignant, notre président avait délégué les deux vice-présidents Jean-Louis Burtscher et Jean-Marc Birsinger pour prendre en charge ces visiteurs peu communs. La casemate et son contenu, les vitrines et les objets exposés furent examinés dans tous les détails, à la grande satisfaction de tous. Puis ce fut un intermède culinaire qui réunit en toute simplicité les intervenants autour d’une bonne table bien garnie.

A 14h, départ de la visite au Schoenenbourg non sans avoir fait un petit arrêt au monument commémorant les combats et la résistance exemplaire des combattants de la ligne Maginot. C’est par l’entrée des hommes que pénétra le groupe, pour parcourir le circuit visitable des arrières, c’est-à-dire la cuisine, l’usine, la salle des filtres, le casernement et l’infirmerie. Au passage le groupe traversa le chantier hivernal où travaillait justement notre ouvrier d’entretien ; le général fut ravi de constater l’ampleur des travaux de maintenance.

Puis ce fut le parcours de la grande galerie, pour ensuite traverser le poste de commandement, le seul véritablement complet de tous les gros ouvrages visitables. Suivit ensuite la traversée du bloc 4 et de ses expositions techniques, avec auparavant un petit détour dans le bas du bloc 6 pour montrer le tassement et les fissures que le bloc a subis durant les combats de juin 1940.

Au bloc 3, le général fut impressionné par la tourelle à canons, les deux pièces de 75 en exposition, la fosse à douilles… remplie de douilles. Le retour se fit en train, à la grande joie de tous les participants.

Vers 17 h, avant de prendre congé, le général Faugère félicita tous les membres de notre association qui se sont investis dans la préservation du fort et de la casemate, ce que n’avait pu faire l’armée française. Puis il consigna ces bonnes paroles et sa grande satisfaction dans notre livre d’or.

 

TRAVAUX AU SCHOENENBOURG

A L’EXTERIEUR :

A la fin juin, un important travail de débroussaillage a été réalisé autour des blocs d’entrée des hommes et des munitions, ainsi qu’autour des entrées de l’abri du Grasserloch.

Le 7 juillet, une entreprise avait été mandatée pour des travaux de nivellement sur les avants du fort. Car dans les années 1980 avaient été aménagées par l’armée trois plates-formes bétonnées pour des tirs d’exercice de chars de combat AMX 30. Ces opérations de terrassement avaient donné lieu à des merlons artificiels qui couronnaient en grande partie le bloc 4. Ces terrains étant redevenus civils en 2002, il convenait maintenant de leur redonner l’aspect d’origine. La pelleteuse manoeuvra toute la journée. Les merlons furent arasés et les plates-formes recouvertes de terre. Le demi-hectare dégagé a été, depuis, ensemencé en herbe de pâturage par l’agriculteur qui loue les dessus.

A L’INTERIEUR

- Mise en place de filtres de réserve

Les filtres récupérés à l’ouvrage de l’Otterbiel ayant été nettoyés et peints, notre équipe technique les mettra en place dans différentes parties du fort, comme cela avait été pratiqué dans d’autres gros ouvrages de la ligne Maginot. Une précédente opération avait déjà eu lieu ; cette fois-ci 6 filtres supplémentaires seront disposés par couples à l’entrée du bloc 2, du bloc 5 et du bloc 3. Cela meuble bien les galeries et est du plus bel effet. En outre, plusieurs emplacements ont été dotés de très rares chariots de manutention de filtres, dont les seuls exemplaires connus avaient pu être récupérés à l’ouvrage du Schiesseck.

- La reconstitution d’un atelier

L’atelier des sapeurs de chemin de fer du Schoenenbourg avait entièrement disparu. Nos techniciens entreprirent de le reconstituer. Il fallut d’abord fabriquer une sorte d’enclos grillagé et le disposer à l’endroit où il existait autrefois. Ensuite, nos bénévoles s’appliquèrent à le meubler en y installant un établi avec deux étaux, différentes armoires à pièces détachées, des jeux d’outillage, des pièces détachées de locotracteurs et de wagons, des matériels en réparation. Le tout fait l’admiration des visiteurs, c’est si bien reconstitué que l’on croirait que cet atelier a toujours été là.

A quelques mètres, un petit convoi formé d’un locotracteur Vétra et de deux wagons fut disposé devant la sortie du monte-charge de 5 tonnes, comme s’il était en attente d’un prochain arrivage.

- Gros travaux dans les magasins aux artifices

Dans le cadre d’une vaste opération de rangement en cours depuis plusieurs mois, il était apparu qu’il fallait aussi réorganiser le stockage dans les arrières. Comme notre ouvrage ne possède pas, à l’instar d’autres comme le Hochwald, le Simserhof ou le Hackenberg, de magasins à munitions intermédiaires à proximité des entrées, il n’y eut qu’une solution qui était d’exploiter les volumes des magasins aux artifices. Il y avait toutefois un hic, c’est que trois magasins sur quatre n’étaient pas crépis, donc très humides, car la maçonnerie brute était sujette à de nombreuses infiltrations d’eau.

Notre équipe technique s’attela dès lors à une vaste tâche. Comme il n’était pas possible de les crépir il fallut les étanchéifier en mettant en place dans les voûtes un revêtement habituellement utilisé dans l’étanchement des fondations et en créant un réseau de gouttières pour évacuer les infiltrations. Pour les piédroits, les entrées d’eau furent colmatées au ciment à prise rapide. Après cela, il fallut reconstituer le réseau d’éclairage qui avait été déposé pour l’occasion.

Un gros travail, mené plusieurs mois durant, avec pour résultat l’assèchement et la réaffectation de deux magasins aux artifices sur trois (le quatrième étant utilisable tel quel).

DANS LES GALERIES

- La galerie de liaison « gare arrière/blockhaus de l’entrée des hommes » sera en travaux pendant plusieurs mois. Il s’agira de tout rénover : les tuyauteries très rouillées, les câbles vermoulus, les murs défraîchis. Ce sera le gros chantier de l’hiver 2006/2007 qui gênera certainement les visites de groupe, mais qu’il faudra assumer. Cela dit, il était temps car ces équipements faisaient piètre figure. Signalons que ce chantier sera mené de bout en bout par notre ouvrier d’entretien salarié, sans lequel une telle opération n’aurait pas été possible.

- Le canon de 47 mm de marine à usage antichar qui avait été rénové et repeint, puis fixé sur sa crinoline après fabrication d’un support pivot, sera exposé dans une niche située dans le coude de la grande galerie. Il sera sous peu doté d’un panneau didactique expliquant entre autres que ce canon était installé, en 1940, à l’air libre et dans un encuvement à 24 mètres au-dessus de l’endroit où il est actuellement visible. Une belle pièce, qu’il aurait été malvenu de s’en dessaisir, comme certains l’avaient préconisé.

- Toujours dans les galeries, et notamment aux avants, ainsi qu’au PC, eut lieu une campagne de retouches de peinture qui améliora l’aspect d’ensemble de cette partie du fort.

- Dans les galeries et les blocs, ont été repeints 8 bacs à sable de lutte contre l’incendie.

- Dans la galerie principale, entre la gare avant et le bloc 4, a été formé un impressionnant convoi d’une vingtaine de wagonnets rendus disponibles par les opérations de rangement.

AUX BLOCS

Aux blocs 3 et 4, ont été déplacés les bacs à sable pour ne pas gêner le passage des visiteurs.

Au bloc 3 :

- Les canons de 75 et les éléments annexes provenant de la chambre de tir de la tourelle du bloc 7 de l’ouvrage du Schiesseck ont été définitivement placés en exposition et entièrement repeints.

- Une armoire à obus de magasin M3 a été grattée et repeinte.

- Une armoire murale d’époque a été fixée à l’étage intermédiaire, elle servira de rangement aux guides.

- Une vaste opération de nettoyage et de dépoussiérage a été entamée cet automne. Dans les différentes expositions, les matériels avaient quasiment changé de couleur sous la couche de poussière. C’est le bloc 3 qui en bénéficiera en premier, suivi de la partie visitable du bloc 4, puis le poste de commandement où abondent les mobiliers en tous genres.

Au bloc 5 :

Un mortier de 81 mm de forteresse a été rénové, complété, repeint et mis en place dans le carrefour bordant le bloc 5. Sous peu, un panneau didactique expliquera aux touristes que ce bloc, qu’ils ne pourront visiter, comporte une tourelle recelant cet armement.

Au bloc 8 :

L’étage inférieur du bloc 8, encore appelé entrée des hommes, a été entièrement repeint. Ce fut là aussi un gros chantier dont on peut se poser la question de son utilité vu que cet endroit n’est pas visitable. Mais il ne faut pas oublier que ce bloc est désormais une entrée utilisable pour les services de secours et, par ailleurs, qu’il pourrait être emprunté couramment alors que de gros chantiers condamneraient l’entrée des munitions.

 

QUELQUES CHIFFRES

Fréquentation en 2006 :

Casemate Esch : 1799 entrées ( moins 22,4%)

Fort de Schoenenbourg : 40 691 entrées (moins 1,9 %)

Il n’est pas inutile de rappeler que la fréquentation touristique est, de manière générale, en régression depuis 2002, en France comme en Allemagne (vie chère, chômage croissant, passage à l’euro, etc). Un exemple significatif est celui du Parc régional des Vosges du Nord, qui englobe une vingtaine de sites (musées, parcs, etc) ouverts au public. En 2005, le taux de fréquentation des ces sites a chuté en moyenne de 23 %. Dans cet ensemble, le Schoenenbourg avait alors été un des rares sites à avoir tiré son épingle du jeu.

 

LA LIGNE MAGINOT SUR INTERNET (suite)

Par Cédric Populus

Remarque : certains d'entre-vous ont entendu parler de la réaction d’une association lorraine aux appréciations émises dans cette rubrique lors du dernier bulletin. Je voulais quand même faire une petite mise au point. La philosophie de cette série d'articles a pour but de faire découvrir la ligne Maginot par les sites Internet des associations. Les remarques et les indices de qualité à l'égard des sites sont de ma propre initiative. Ils ne sont pas dirigés contre les associations et leur travail, mais uniquement pour décrire la pertinence et la qualité des sites Internet. Cet incident étant clos, poursuivons notre voyage dans le Nord-Est, en Alsace.

Lieu : secteur fortifié des Vosges.

Adresse : http://www.maginot-alsace.fr/

Restauration : casemate CORF Dambach Nord.

Auteur (s) : Benoit Henrich.

Remarques : belle présentation du secteur de la vallée de la Schwarzbach avec un plan d’organisation bien conçu. Les travaux réalisés par l’association sont illustrés de quelques photos. Mais les photos ne sont pas nombreuses, même sur la casemate en elle-même. On s’attend à voir un peu plus sur le secteur de la Schwarzbach, sur les barrages, sur les casemates et les blockhaus.

Indice de qualité : **

 

Lieu : secteur fortifié des Vosges.

Adresse : http://membres.lycos.fr/fourachaux/

Restauration : ouvrage du Four à Chaux

Auteur (s) : office du tourisme de Lembach.

Remarques : le site présente le minimum sur l’ouvrage. Trop peu de photos, pas de plan. C'est en fait un prospectus touristique intégré à un site Internet.

Indice de qualité : *

 

Lieu : secteur fortifié de Haguenau.

Adresse : http://www.lignemaginot.com

Restauration : ouvrage du Schoenenbourg et casemate CORF Esch.

Auteur (s) : Jean-Marc Birsinger.

Remarques : nos membres connaissent bien ce site. C’est une véritable encyclopédie de la fortification. Certes notre association peut être fière de ce travail collectif où chacun peut y apporter sa "pierre". Ce site présente non seulement la Ligne Maginot dans son ensemble, mais il s'étend aux fortifications d'autres pays. C'est un aperçu international de la fortification qui permet de comparer les constructions fortifiées.

Indice de qualité : ****

 

Lieu : secteur fortifié de Haguenau.

Adresse : http://www.maginot-hatten.com

Restauration : abri CORF Hatten.

Auteur (s) : association du Musée de l’Abri de Hatten.

Remarques : le site est principalement consacré au matériel militaire et véhicules. L’abri est peu décrit et comporte deux photos. Dans la thématique fortification, une seule photo présente la formidable collection de maquettes de Robert Ehrstein. Bien que cela ne soit pas sa vocation première, ce site manque de contenu sur la Ligne Maginot et de photos.

Indice de qualité (uniquement sur le plan Maginot) : *

 

Lieu : secteur fortifié d’Altkirch.

Adresse : http://www.maginot68.com

Restauration : casemate STG Aschenbach

Date de mise en ligne : 2005

Auteur (s) : association Mémorial Maginot de Haute Alsace.

Remarques : l'ergonomie et la présentation du site sont de qualité. La description de la casemate est rapide, mais le suivi des travaux est bien illustré. En fait, pour mieux connaître la Ligne Maginot, un lien vous envoie sur un autre site, aussi réalisé par un membre de cette association (voir ci-dessous).

Indice de qualité : ***

 

Lieu : secteur fortifié d’Altkirch.

Adresse : http://www.alsacemaginot.com

Restauration : casemate STG Aschenbach

Auteur (s) : Hervé Weyant.

Remarques : site intéressant et bien réalisé. Certes de nombreuses régions de la Ligne Maginot ne sont pas traitées, mais au moins ici ces liens sont inactifs… Et La navigation est claire. L'ergonomie est bien soignée, tout comme les cartes et les plans. Je souligne le fait que ce site est tout récent. Bonne continuation à son auteur.

Indice de qualité : ***

Nous arrivons aux portes de l’Alsace. La suite au prochain numéro.

 

LIRE

- Dans 39/45 Magazine de septembre 2006, lire un reportage sur la récupération des deux tourelles de l’ouvrage de Molvange, rédigé par Jean-Yves Mary. Le tout est agrémenté de très belles photos sur l’extraction des tourelles.

- Dans Histoire de guerre de juillet-août, Michel Truttmann raconte l’assaut sur l’ouvrage du Kerfent.

- Dans Histoire de guerre d’octobre, Michel Truttmann décrit l’attaque de Marckolsheim

- Un nouveau livre sur la ligne Maginot est paru depuis peu. Il s’agit de « La ligne Maginot de 1945 à nos jours ». Dans cet ouvrage, Michael Séramour décrit la remise en état des ouvrages, leur abandon, leur état actuel, l’action des associations de sauvegarde, de l’armée, des anciens. Un sujet jamais traité et en plus de nombreuses photos dont beaucoup faites par des maginotphiles de la première heure. Un livre qui a toute sa place dans votre bibliothèque.

Vendue au prix de 29 euros, cette publication est disponible dans les bonnes librairies. Elle peut aussi être commandée aux éditions Jean-Pierre Gyss BP 70111 57703 HAYANGE, en vente également au Schoenenbourg.

- Dans le hors série de « Batailles – l’histoire militaire du 20e siècle » Alain Hohnadel et Jean-Yves Mary ont rédigé « Juin 1940 – les Allemands passent le Rhin ». Sur 82 pages avec des schémas à l’appui, et bien entendu de nombreuses photos d’époque, les auteurs retracent l’attaque en force de la ligne Maginot du Rhin.

En vente dans tous les magasins de presse, au prix de 10,95 euros.

- Et enfin, un livre plus généraliste ayant pour titre « Le mythe de la guerre-éclair, la campagne de l’ouest de 1940 » écrit par un Allemand, Karl-Heinz Frizer et traduit en français, où l’auteur apporte un tout autre éclairage sur la campagne de mai-juin 1940 menée par les armées allemandes. Aux éditions Belin, juin 2003.

 

LA COTISATION 2007

Comme tous les ans, nous vous invitons à renouveler votre engagement envers notre association par le paiement de la cotisation. Celle-ci se monte à 16 euros

Les actifs qui voudront être assurés devront verser 24 euros au moment de régler leur cotisation.

Les envois sont à adresser à :

Armand JACQUES, 265 rue Principale

67160 SCHLEITHAL

Prenez soin de libeller votre chèque au nom de l’association. Les virements postaux se font sur le compte 1775 89 s

OUVERTURES DU SCHOENENBOURG

DEVANT ETRE ASSUREES PAR

LES BENEVOLES

 

L’ASSEMBLEE GENERALE

se déroulera à la maison Ungerer, à Hunspach, le samedi 17 mars à 14 h 30.

D’ici là,

Le président Marc Halter et le Conseil d’administration souhaitent une bonne année 2007 à tous nos membres et à tous nos lecteurs

 

Notre dossier

LE SCHOENENBOURG LIVRE BATAILLE

(Période du 14 au 24 juin 1940)

Les notes qui vont suivre ont été rédigées par le lieutenant Larue, qui a alors fonction d’officier adjoint au Schoenenbourg. Il est donc celui qu’on peut appeler le bras droit du commandant Reynier. A ce titre, il n’eut pas, comme d’autres officiers qui étaient en poste quasiment jour et nuit, à intervenir dans le déroulement des affrontements. De ce fait, et par sa disponibilité, il a pu être un témoin précieux des événements qui ont marqué l’histoire de notre forteresse. Rappelons, à cette occasion, que le commandant Reynier était bien le « patron » du fort mais que par exemple il n’avait aucune compétence sur les actions menées par l’artillerie (blocs 3, 4 et 5), qui elle dépendait du groupement (donc du commandant Rodolphe) installé à l’ouvrage du Hochwald.

Mais place à l’histoire.

 

14 Juin 1940.

De nombreux passages d’avions ennemis sur lesquels nos tourelles tirent.

Dès 14 heures, la nouvelle section de 120 L de Bange installée entre les blocs arrières, exécute des missions d’interdiction lointaine vers Schleithal et la tuilerie de Salmbach. Le colonel Schwartz, commandant le S.F.H., arrive à l’ouvrage à 14 heures 30, assiste un moment au tir et félicite le chef, le sous-lieutenant Peyrou, ainsi que son adjoint, l’adjudant Eschenlauer. Le colonel Miconnet, commandant le sous-secteur, arrive également à l’ouvrage. Il y a réunion chez le commandant. On y discute de la possibilité d’un repli suivi de destruction des ouvrages. Cette nouvelle jette la consternation chez ceux, rares, qui la connaissent. On prépare tout en souhaitant qu’il ne se fera rien.

De 22 heures à 24 heures, le bloc 4 exécute un harcèlement sur Wissembourg.

15 Juin 1940.

De 2 heures à 4 heures, harcèlement sur Wissembourg par le Bloc 3.

A partir de 4 heures, la pression ennemie augmente sans cesse sur le sous-secteur de Hoffen, d’Oberseebach à Croetwiller. Il en résulte une débauche de tirs, que nos tourelles expédient allègrement. Certains P.A. tiennent, d’autres cèdent. Le blockhaus d’Oberseebach-Est est pris.

Les tirs continuent toute la journée. Le blockhaus d’Oberseebach est repris grâce à l’appui des tourelles, de même que tous les P.A. (ligne de points d’appui ou avant-postes) entre Oberseebach et Aschbach, mais au sud, Aschbach, Stundwiller et Buhl sont ennemis. Le P.A. l0 et les bétons de Trimbach sont encerclés.

Schoenenbourg est la seule artillerie du secteur capable d’intervenir efficacement dans ce coin, les consommations sont très élevées : au déjeuner, Michaud (B3) a déjà envoyé 1 500 coups. En fin de journée, au total il y en a 3 700 de 75 et 140 de 120, ce qui représente, de la part du personnel, un gros effort. Aux tourelles, quelques ennuis mécaniques sont rapidement réduits par le Génie.

Au P.C.A., malgré un personnel insuffisant (la relève des officiers n’était pas prévue) tout marche à merveille. Il ne faut pas oublier non plus les observateurs Guhl et Mall, d’Aschbach et Hoffen, qui, en liaison directe avec l’infanterie, peuvent demander avec précision tous les tirs nécessaires et les régler. Il paraît que l’efficacité est grande. Malheureusement, de nombreux objectifs sont signalés hors de portée.

Cet engagement dans la bataille nous soulage un peu ; il ne sera sans doute plus question de repli, il faut tenir.

Le P.A. 7, ses mitrailleuses enrayées, est sauvé grâce aux nombreux tirs d’arrêt des tourelles.

16 Juin 1940.

La pression ennemie semble moins forte, mais on signale des hommes partout et les tourelles lâchent leurs tirs sans arrêt – dix coups par ci – dix coups par là. – A tour de rôle les officiers du P.C.A., capitaines Cortassse et François, lieutenants Colson, Pinard et Peyrou, par équipes de deux président à un savant dosage, de façon à réaliser à la fois un effet massif et une économie de munitions. Dans les 24 heures 1160 coups de 75 et une cinquantaine de 120 sont envoyés.

La situation est inchangée dans le secteur voisin, mais les nouvelles des opérations générales sont mauvaises. Les Allemands atteignent Cray, Langres, la Loire. On se remonte mutuellement le moral en racontant des histoires de nos campagnes passées.

Le P.A. 7 doit se replier (Lieutenant Meyer).

17 Juin 1940.

Après une journée relativement calme, la pression ennemie augmente. Les P.A. résistent courageusement, mais difficilement. Les observatoires d’Hoffen et Aschbach font un excellent travail.

Seuls les P.A. 3, 4 et 5 résistent.

A 12 heures 30, mauvaises nouvelles : l’armistice est demandé à l’Allemagne. L’armée française est coupée en 4 tronçons. La lutte continue, mais nous sommes complètement coupés. Il y a donc lieu d’économiser tout pour tenir jusqu’au bout, quelle que soit la durée de cette lutte. Nous combattons maintenant pour l’honneur du drapeau.

Dans les 24 heures, on a tiré 1 000 coups de 75 et une trentaine de 120.

A partir de Hoffen (observatoire) la ligne suit le réseau de rails. Nous tenons vers les crêtes Est des bois Unterwald, Mittelwald, Oberwald et le Blockhaus-Est d’Oberseebach, celui du nord est en sérieuses difficultés.

18 Juin 1940.

Journée moins active au point de vue artillerie, mais de rendement meilleur. 565 coups seulement de 75 et une trentaine encore de 120.

La résistance des P.A. diminue, faute de liaison et de ravitaillements. Le P.A. 5 est perdu et il est impossible de le reprendre malgré quelques tentatives. Le P.A. 4, occupé en partie seulement, et qui est littéralement submergé, doit se retirer dans l’après-midi. Les liaisons avec les observatoires sont intactes, et l’artillerie, aux dires des observateurs, s’est montrée d’une belle efficacité. Ces deux observatoires se défendent au jumelage.

Les Allemands abattent le clocher d’Aschbach que nous visions depuis quelques jours. On ne comprend pas toujours ce qu’ils font.

19 Juin 1940.

Dans la matinée, des bombardiers ennemis se livrent à des bombardements sur le Four à Chaux et le Hochwald-Est en piqué. Nos tourelles font de la DCA. Il semble qu’il y ait quelques éléments ennemis à la Hasselmuhl avec un projecteur. C’est assez invraisemblable et on ne peut pas vérifier sérieusement.

Dans la nuit nous avons abandonné tout ce qui se trouve à l’est de la voie ferrée au nord de la ligne et à l’est de la ligne fortifiée également entre Hatten et Hunspach ; L’ennemi, qui sans doute n’a pas aperçu ce mouvement, déclenche une attaque sur ces positions avec artillerie et armes automatiques.

Les bombardements aériens continuent dans l’après-midi. Devant la menace, on fait rentrer le personnel de la section de 120 L qui rejoint son poste normal au bloc 5. A peine est-il rentré que quelques bombes tombent entre les blocs 7 et 8, vers 15 h.30, puis un tir percutant sur le bois de Schoenenbourg.

L’artillerie continue à tirer.

Vers 20 heures, 30 bombardiers ennemis se dirigent sur l’ouvrage et nous bombardent. Ils nous lâchent une trentaine de grosses bombes et une cinquantaine de petites en 20 minutes. Le Hochwald nous fait une protection DCA.

Au bloc 1, le sergent-chef Wallior, le sergent Cardot, le caporal Dhieux, le 1ère classe Blanchard, les soldats Moreau, Kieffer, Bastien et le sapeur Giraud du poste radio, qui prêtait main-forte à ses camarades fantassins du FM de DCA sont blessés.

L’adjudant-chef Lorthioir, le chef de bloc, ne cesse son tir que lorsque le souffle des éclatements lui a arraché la grille de visée et l’œilleton de son arme. Les points de chute se répartissent sur toute la superficie des avants. La tourelle 4 est recouverte de terre. Le jumelage de mitrailleuses du bloc 1 a son cadre faussé. En ¾ heure, tout est rangé, paré, prêt à fonctionner.

Aucun dégât matériel important. Les entonnoirs sont impressionnants, 5 ou 6 mètres de profondeur au moins, et 20 mètres de diamètre. Fort heureusement, il n’y a pas de harcèlement et les sapeurs peuvent aller dégager la tourelle.

L’impression sur la garnison est d’abord une surprise. Les vibrations ont une grande amplitude. Le béton fait preuve d’une telle élasticité qu’on se croirait sur un bateau. Lorsqu’une bombe tombe sur le béton ou tout près, le son est dur et désagréable, c’est le coup de poinçon qui fait croire que tout est cassé.

Un fait glorieux, malheureusement non confirmé : Un observateur de Drachenbronn, après nos tirs de DCA. sur le Hochwald, dit avoir vu un appareil ennemi s’enfuir vers Wissembourg, en flammes, puis un second s’enfuir également en lâchant une fumée noire.

Pendant ces 24 heures, les tourelles ont envoyé 1.160 coups.

Ce bombardement, violent pour un premier coup, il faut bien le dire, n’a fait que renforcer notre confiance dans notre cher vieil ouvrage.

20 Juin 1940.

Le tir des tourelles continue pendant la nuit. La matinée est calme, trop calme.

Dès le début de l’après-midi, l’attaque reprend sur Hoffen et Aschbach. Il y a un déploiement considérable d’infanterie et d’armes antichar qui tirent de très près dans les créneaux.

Au même moment, on apprend que l’ennemi est à Surbourg et se dirige vers nous. C’est bien la plus désagréable des sensations.

Cette fois, l’encerclement est complet. On ne doit plus compter que sur nous et nos réserves. Les blocs arrières passent blocs avants et sont de ce fait bombardés, par avions, en même temps que les autres ; d’ailleurs ce ne sont pas des grosses bombes et les vibrations sont faibles, relativement.

On apprend que les avant-postes ont été repliés dans la nuit et sont installés face à l’arrière.

L’artillerie se donne tant qu’elle peut. Une batterie adverse est disloquée à Surbourg au moment où elle se mettait en position, vers Aschbach et Hoffen ; toutes les colonnes d’infanterie qui s’approchent des observatoires sont prises à partie violemment et ce, indépendamment des tirs contre avions sur le Hochwald et les observatoires d’Aschbach et Hoffen.

On fait des tirs d’essai avec la tourelle de 81. Il y a des incidents de culasse – ce matériel est trop fragile.

Les liaisons téléphoniques avec les observatoires de Hoffen et Aschbach sont coupées au cours des bombardements par avions. – Cela nous cause une certaine angoisse, tant sur le sort de nos camarades, qui ont fait un travail magnifique, que sur le fait que, sans eux, le PCA voit ses moyens très diminués, en effet, les tirs demandés par le sous-secteur arrivent avec un retard tel et une précision si insuffisante que leur efficacité est douteuse.

A 20 heures, à une minute près la même heure qu’hier, le bombardement des avants reprend. Trente bombardiers nous lâchent un tonnage de bombes sensiblement égal à celui d’hier, dans le même temps, sans causer de grands dégâts, sauf une fissure à la voûte et au radier du 75 du bloc 3. Ce bombardement est suivi d’un harcèlement panaché par calibre moyen et gros. Les tourelles sont recouvertes de terre et les sapeurs sortent pour les dégager, sous la conduite du capitaine Stroh et de l’adjudant Hascouët, l’un et l’autre toujours sur la brèche en pareil cas (la veille déjà) .

On apprend au dîner les citations de Michaud, Lefrou, Schmitt – Pinard, Peyrou, le capitaine François et Colson, qui n’ont cependant pas cessé, eux aussi, de fournir un effort méritoire, ne font pas partie de cette promotion. Ce sera sans doute pour plus tard.

Pendant ces 24 heures, 96 tirs ont été exécutés, représentant une consommation de 2 050 coups.

21 Juin 1940.

Vers 0 heures 30, des éléments ennemis s’attaquent au Hochwald-Est.

Aussitôt, Schoenenbourg, toujours prêt à intervenir, envoie jusqu’à 5 heures 1.600 coups (à la demande du PCA. EST ou de l’ensemble. On parle de mitraillettes, de lance-flammes etc…On ne retrouve, paraît-il, aucune trace.

La liaison a été rétablie avec Guhl et Mall. Guhl a dû abandonner sa cloche périscopique rendue inutilisable par les tirs d’embrasure.

Cette liaison est presque aussitôt coupée.

Vers 8 heures 30, nouveau bombardement aérien, à la fois sur les arrières et les avants. Le bloc 6 reçoit une bombe dans son fossé diamant. La secousse est violente. Le béton résiste, mais il y a un fort ménisque dans le mur de gorge, à la hauteur de la chambre de repos. Le personnel occupant cette pièce n’est pas blessé, mais assez choqué. Il se produit une fissure à la jonction du bloc et du puits et l’escalier reliant les deux étages du bloc est sérieusement endommagé. Il faut l’abattre pour éviter des chutes dangereuses de matériaux. Le bloc 3 a été secoué aussi, mais sans grands dommages. Le déclenchement à ce moment précis du signal d’alerte aux gaz, dû à la pénétration d’abondantes fumées aux entrées, augmente la confusion. Le commandant, qui est toujours debout, rétablit rapidement la situation en remettant chacun à son poste.

On reçoit la citation du capitaine Cortasse.

De 11 heures 15 à 12 heures, nouveau bombardement aérien. Dans l’après-midi on signale sur la route nationale de Wissembourg des véhicules à fanions blancs. On ouvre le feu avec la tourelle de mitrailleuses, quoique la distance soit un peu élevée.

La tourelle de 81 effectue des tirs. Ca ne marche pas trop mal.

A 18 heures 30, nouveau bombardement aérien, puis vers 19 heures, bombardement par très gros calibre à cadence lente. – Fin de bombardement vers 20 heures 40.- Environ 8 ou 10 coups toujours dans les parages du bloc 6.- Aucun dégât constaté, mais on a l’impression que cette fois nous gênons trop l’ennemi et il nous envoie quelque chose de très gros. C’est trop d’honneur.- Les vibrations ne sont peut-être plus aussi fortes que pour les bombes, mais le coup de poinçon est extrêmement violent.

Le groupe franc, soit avec Mathès, soit avec Fleck, sort pour surveiller les dessus et éviter les infiltrations.

On reçoit des messages radio chiffrés des observatoires. Cette liaison radio a été établie lentement parce qu’elle est fonction d’une première liaison de casemate à casemate et cette lenteur est augmentée par le chiffrement. Une liaison radiophonique entre les observatoires et l’ouvrage aurait été préférable pour ces questions de tirs.

L’activité générale est moindre : 1 120 coups.

22 Juin 1940.

Quelques percutants de gros, moyens et petits calibres se répartissent entre avants et arrières. Quelques avions passent, l’un d’eux mitraille, sans doute la route nationale, on ne sait.

L’ennemi s’exerce au tir d’embrasure sur ce pauvre Bloc 6.

Aucun dégât important.

Dès que les tourelles se mettent en batterie, elles sont prises à partie par du calibre 88 ou 105.

Dès 16 heures 15, bombardement par très gros calibre, - coup de poinçon à chaque arrivée -. Cadence plus rapide, un coup par 7 minutes.

Tout l’ouvrage vibre. Une quinzaine de coups environ, suivis par un tir de harcèlement de petit calibre, encore sur le bloc 6, puis le calme revient.

Depuis hier au soir, l’ennemi fait chaque soir, à partir de 21 heures 30, un petit feu d’artifices.

Consommation des 24 heures : 600 coups.

23 Juin 1940.

Vers 1 heure, tir de protection sur la casemate de Bremmelbach -Sud. On ne comprend pas très bien.

La matinée est calme, mais à chaque mouvement que font les tourelles, elles sont prises à partie par une pluie de petits obus. La cloche du bloc 6 est momentanément hors service, son périscope étant bloqué. Incident auquel il est rapidement remédié.

La tourelle de 81 tire dans l’après-midi ; ça marche. – Michaud, qui voulait faire du tir fusant à vue, encaisse un coup dans sa tourelle. Le dégât est insignifiant, mais la mise en éclipse ne se fait plus à fond.

On signale l’ennemi un peu partout, des isolés.

Le harcèlement sur l’ouvrage a duré toute la journée, puis, vers 19 heures 20, le très gros calibre entre en action. Une quinzaine de coups environ, à raison d’un par 7 minutes. L’un d’eux tombe sur le bloc 5, secouant fortement le bloc et l’ouvrage par contrecoup.

Fissurant et crevassant les locaux souterrains, en particulier la chambre où logent Pinard et Peyrou, qui est saccagée. Les enduits tombent un peu partout à chaque coup. Le bloc 3 reçoit son coup aussi, même jeu.

Liaison rétablie avec Aschbach et Hoffen.

Fleck sort avec le groupe franc, il patrouille et rapporte des renseignements sur le coup du Bloc 5. On l’a échappé belle !

Si le coup était tombé 50 cm, plus loin, il atteignait en plein la cloche lance-grenades dont la protection supérieure consiste en une plaque d’acier de 4 cm d’épaisseur.

Le feu d’artifice allemand arrive à son heure.

Consommation de la journée : 230 coups.

24 Juin 1940.

Nuit et matinée très calmes.

Pour abuser l’ennemi, on fait le mort, ce qui évite les tirs systématiques. En fait, aucun coup ne nous atteint.

Grâce aux éclats, nous identifions le calibre des projectiles qui nous secouent si bien ; c’est tout simplement du 420. – Celui qui est tombé sur le bloc 5 a fait un trou de 60 cm. de profondeur.

Les éclats sont énormes, 6 cm. de parois.

Dans l’après-midi, Pinard, muni de son appareil photographique, se fait accueillir par quelques percutants en allant chercher des images de notre petit coin de lune.

Vers 16 heures 15, le sous-secteur de Soufflenheim demande un tir sur Rittershoffen, et la riposte est immédiate

Il paraît qu’au Hochwald, deux prisonniers allemands interrogés ont retenu de l’artillerie de forteresse une impression qui doit être celle d’un lapin sur le pré devant un chasseur adroit. – C’est leur propre expression -.

Un tir de harcèlement de 220 coups est prévu sur la région de Rittershoffen jusqu’à 3 heures du matin, mais la radio annonce l’armistice pour 1 heure 30, heure française.

C’est une source de confusion qu’on essaie de réduire par une foule de coups de téléphone. Enfin il est décidé qu’on cessera le feu à 0 heure 35.

Conclusion.

Pendant cette période, on peut estimer que l’ouvrage de Schoenenbourg a reçu, au maximum, environ :

50 bombes de fort calibre (de 1.000 à 1.800 kilos)

120 bombes de moyen calibre (jusqu’à 500 kilos)

40 projectiles de 420 m/m de rupture

20 projectiles de gros calibres (de 210 à 280 ?)

5 000 coups au moins de 150 ou 105.

Après ces tirs, les dessus de l’ouvrage sont profondément labourés (10 à 12 m). Une cheminée de 420 s’enfonçait jusqu’à 12 mètres.

Les blocs sont décapés, en partie, le fossé diamant du bloc 6 est éventré, la pipe d’air cuirassée de ce bloc arrachée et projetée à 20 m par un 420, la section des 120 L des avants détruite et enterrée. Fait curieux, alors que des pièces résistantes comme les rails par exemple sont sectionnées, les périscopes qui se trouvaient en position d’observation au moment des bombardements et qui constituent tout de même une pièce faible, n’ont pas souffert. Celui du bloc 4, cloche périscopique, a été recouvert de débris par des éclatements près de la tourelle sans subir de ce fait aucune détérioration. De même le détecteur Z du s/lieutenant Audran, placé près du bloc 1 sur un simple tube, a résisté à presque tous les bombardements (sauf le dernier).

Les épiscopes des cloches, contrairement à ce que l’on pouvait attendre après l’accident du bloc 5 (guetteur tué) ont tous résisté.

Aux arrières les bombes lancées dans le but manifeste soit de pénétration par la grille (bloc 7), soit de destruction de l’aérorefroidisseur (bloc 8), n’ont pas atteint leur but, sans doute parce que la proximité de la forêt gênait le pointage des bombardiers ennemis. Les antennes de façades de ces blocs ont été sectionnées, tandis que les descentes d’antennes, moins robustes, ont résisté.

A l’intérieur, de nombreuses fissures sont constatées aux blocs 3,4,5,6. En un mot, dans tous les blocs particulièrement atteints. Il y a également de nombreuses chutes d’enduit. Le bloc 6 a une fissure à la partie supérieure du puits et une à la partie inférieure.

A chaque instant, les dégâts ont été réparés dans un minimum de temps. Au bloc 1, le jumelage est remplacé par l’adjudant Nadaud en ¾ d’heure, le cadre réparé par le Génie en 6 heures (adjudant Jouan). Au bloc 2, l’adjudant Roland remet en état le tableau divisionnaire. Le capitaine Stroh et l’adjudant Hascouët dégagent les tourelles. – Le docteur Brandel, assisté de ses deux auxiliaires, Loisance et Derouet, opère, à l’infirmerie, dans des conditions assez peu confortables, un sapeur qui s’est tiré une balle dans la main, par maladresse. Le Génie coule un mur supplémentaire de béton dans la chambre de repos du bloc 6.

Les blessés ont demandé eux-mêmes à retourner à leurs blocs après un repos infime à l’infirmerie.

Il faudrait nommer tout le monde. Le moral de la garnison n’a pas souffert pendant cette période pénible et tous se sont montrés à la hauteur de leur mission. Malgré une température excessive, les électromécaniciens ont assuré le service de l’usine dès que la centrale de Haguenau eut interrompu le sien. Tout a fonctionné sans accroc.

On a demandé à tous de combattre pour l’honneur du drapeau, ils l’ont fait sans hésiter et ont su faire respecter leur fière devise, aussi : « ON NE PASSE PAS ! »


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